La guerre du Viêt-nam.
Cette guerre dont seule une minorité d’Américains approuvait l’action et le mobile.
Le mobile : contenir l’extension internationale du communisme.
L’action, Joe Haldeman en paya le tribut.
Il en garda son histoire à travers un journal qui lui procura la matière d’un roman naturaliste
dénonçant la guerre : War Year (Au service de la guerre), son premier roman.
S’étant toujours considéré comme un auteur de science-fiction, Haldeman savait qu’il
transposerait tôt ou tard son expérience du Viêt-nam dans son genre favori.
Cela nous menait droit à La guerre éternelle.
Son début reprend les souvenirs de Haldeman aux quelques mois précédant son envoi au Viêt-nam,
au moment où il subissait l’instruction militaire de base, raconte-t-il, quand, par une nuit
glaciale, un lieutenant fraîchement émoulu déclara à la troupe :
« Cette nuit, nous allons vous montrer les huit meilleures manières de tuer un homme
silencieusement. »
Voici comment Joe Haldeman présente lui-même son roman :
« Ainsi cette guerre débute à la suite d’une attaque qui n’a jamais eu lieu. Un autre parallèle
réside dans le fait que la nation américaine se trouve isolée de la violence, dans une quiétude
parfaite – simplement, elle perd au loin des jeunes hommes et femmes, en gaspillant des
montagnes de dollars. Les deux guerres traînent en longueur. Lorsque les soldats reviennent
au foyer, ils trouvent radicalement changé le pays pour lequel ils ont combattu. Et la plupart
des gens se soucient fort peu de ce qui leur est arrivé. »
Pour Haldeman : « La guerre éternelle est beaucoup plus un ouvrage dénonçant la guerre
qu’un roman antimilitariste. »
Après La guerre éternelle, Joe Haldeman a écrit une suite :
La paix éternelle.
La liberté éternelle n'appartient pas quant à elle à l'univers de La guerre éternelle.
Revenons-en à La guerre éternelle.
En 2001, Haldeman reçoit une offre de l’éditeur : « Il compte republier The forever war, mais
cette fois en une seul volume », écrit-il à Mark Marvano.
Il a appris également que les Editions Dupuis souhaitent, elles aussi, rééditer La guerre
éternelle en intégrale, au format bande-dessinée en l’occurrence.
Et Mark Marvano lui confirme aussitôt ce fait.
Remontons dans le temps.
C’est à la Convention Benelux de la science-fiction de Gand en 1980, où Joe Haldeman était
invité d’honneur, que Mark Marvano lui proposa d’adapter en BD La guerre éternelle. Et
après la Convention Mondiale de la science-fiction de Brighton en 1987, le projet prit
vraiment forme. Marvano reçut l’autorisation officielle de « bandessiner » The forever war et
de la proposer à des éditeurs européens.
Pour les deux auteurs, le parcours n’a pas toujours été aussi « facile » dès le début. Il
s’agissait presque d’un parcours du combattant, les éditeurs ne se montrant pas enclins à
éditer cette histoire.
Voici comment les Editions Dupuis présentent l’intégrale de La guerre éternelle en BD de
Marvano – Haldeman, en quatrième de couverture :
« Jusque-là, personne n’avait jamais vu les Taurans, ni su à quoi ils ressemblaient, ni même
connu leurs véritables intentions. Mais une fusée terrienne fut détruite par les ennemis
extraterrestres, c’est du moins ce qu’annonça la télévision. Aussitôt, politiciens et généraux
décrétèrent qu’il fallait en finir une fois pour toutes avec cette menace intolérable. Cela
commença avec la Grande Conscription de 2009 et la constitution d’un corps expéditionnaire
d’élite. C’est ainsi que Marygay Potter et William Mandella furent embringués dans une
guerre qui allait durer plus de mille ans… »
La BD est d’une grande qualité. Dense, ciselée, elle est beaucoup plus concise que le roman.
Il n’y aucune digression littéraire, ce qui n’étonnera pas puisqu’il s’agit d’une bande-dessinée,
autrement dit, des dessins et du texte racontant une histoire. Les événements y sont plus
succinctement présentés. Mais le récit n’y perd rien ; il s’agit de l’absurdité d’une guerre où
s’entremêlent les êtres et les événements au fil de la souffrance, de la coupure, de la perte du
sens, du déchirement. Le récit coule au rythme des images, découpées en rectangles qui
dissèquent les plans. Le format BD est curieusement adapté à ce récit où mille ans filent à
toute allure en trois parties crayonnées et colorées. Mais il ne s’agit pas d’un succédané
d’album photo. Il y a une histoire, des événements percutants, des personnages qui sont plus
en quête de vie que de survie malgré leurs maigres chances de revoir le pays.
A lire absolument, avant, après ou pendant la lecture du roman de Joe Haldeman.